Si Paris n’avait pas la Seine et Marne : Les rivières de Seine et Marne qui alimentent Paris en eau

Publié le par Mireille LOPEZ

 

  

Si Paris n’avait pas la Seine et Marne…..

Les rivières de Seine et Marne qui alimentent Paris en eau

  

 


Paru sur le site : Grigny Hier
Cahiers de l'Association de L'histoire locale de "l'Orme du bout"

 

Les aqueducs des eaux de  la Vanne, du Loing et du Lunain

Arrive la guerre de 1870 et la "Commune de Paris".

Après ces évènements majeurs de notre Histoire, huit préfets vont se succéder à la tête de la Préfecture de la Seine jusqu'à l'arrivée en 1883 d'un certain Poubelle qui laissa pour la postérité son nom à la fameuse "boîte mobile" qu'il imposa aux Parisiens pour l'enlèvement des ordures ménagères par un célèbre arrêt de 1884.

Parallèlement, pendant cette période, en opposition à cette valse des préfets, c'est dans la direction des services qu'il y aura continuité. Directeur des services des Eaux et des Egouts, Belgrand obtient une priorité de fait pour ses travaux. Reprenant le chantier de la dérivation de la Vanne, il les mène à leur terme en 1874 en s'appuyant notamment sur son cadet, Edmond Huet, réalisateur du viaduc d'Arcueil. (cf annexe 1)

Belgrand meurt en 1878. Alphand lui, meurt en décembre 1891 suivant de peu Georges Haussmann auquel il avait succédé à l'Académie des Beaux Arts.
Le fameux service municipal des Travaux de Paris se restructure et est créé un service spécial des dérivations des sources de la Vig
ne et de Verneuil en 1890-91 dont la responsabilité a été confiée à un jeune ingénieur en chef récemment promu à ce grade, un certain Fulgence Bienvenüe (dont la nièce épousera en 1883 le futur Maréchal Foch, avec lequel Bienvenüe s'était lié d'amitié à l'école Polytechnique) qui mènera par la suite l'œuvre de sa vie et qui reste attachée à son nom, la réalisation du Métropolitain de Paris. Mais ceci est une autre histoire.

Une nouvelle fois Paris n'a plus assez d'eau

Depuis la mort de Belgrand, l'augmentation de la population parisienne a rendu insuffisante les apports des dérivations de la Dhuis et de la Vanne. Dès 1882 il est a nouveau fait appel en complément à de l'eau de Seine ce qui provoque une recrudescence de maladies infectieuses. De nouvelles dérivations s'avèrent nécessaires. En février 1891, Fulgence Bienvenüe reçoit la responsabilité du service des dérivations.

Annexe 1

Du côté nord du boulevard Reille, un vaste cube de pierres saisi les regards par sa masse imposante et ses grandes murailles : c'est le réservoir où aboutissent les eaux de la Vanne, petite rivière dont les sources sont captées dans les environs de Theil, dans le département de l'Yonne et amenées à Paris par un aqueduc tantôt souterrain, tantôt en arcades, long de 173 kilomètres.

Cette dérivation, autorisée par un décret impérial du 19 décembre 1866 et qui a coûté 47 millions y compris la construction du réservoir, assure à la ville de Paris, comme étiage, un volume moyen de 1100 litres par seconde ou 100 000 mètres cubes par 24 heures, d'une eau limpide et fraîche, présentant toutes les conditions de salubrité qui font l'excellente eau potable.

Le réservoir de Montsouris peut recevoir 300 000 mètres cubes, c'est à dire le produit des sources de la Vanne pendant trois jours, récemment accru par l'adjonction des sources de Cochepies, captées près de Villeneuve-sur-Yonne. Il est construit en meulière et ciment, à deux étages superposés, divisés chacun en deux parties égales, formant ainsi quatre bassins indépendants.

Il est circonscrit par l'avenue de Montsouris à l'est, par le boulevard Reille au midi, et à l'ouest par la rue de la Tombe Issoire.
in, Paris il y a cent ans vu par Auguste Vitu 1875-1975

Annexe 2

En 1871 les habitants de Grigny avaient formulé des observations quant à la réalisation de ces travaux, observations qui avaient suscité une réunion extraordinaire du Conseil municipal (séance du 18 octobre 1871) dont nous reproduisons un extrait :

Monsieur le Maire appelle l'attention du Conseil sur ce qui regarde les travaux de l'aqueduc des eaux de la Vanne. Il fait remarquer la justesse des plaintes formées par les habitants de la commune qui voient avec regret cet "immense monument" couper non seulement les pièces de terres en deux, mais aussi détruire le niveau des deux chemins principaux de Grigny qui formeront à l'avenir leurs monticules factices fort pénibles à gravir et à descendre par les nombreuses voitures qui se rendent aux marchés de Montlhéry et de Longjumeau. Le Conseil municipal après mûre délibération, considérant que la commune de Grigny est traversée par l'aqueduc des eaux de la Vanne, que cet aqueduc traverse les chemins de Grigny à Montlhéry et de Grigny à la Norville, considérant que la hauteur de l'aqueduc à ces deux points de rencontre nécessiterait la rectification de deux nouvelles routes qui passeront par dessus et nécessiteraient une pente très préjudiciable aux intérêts de l'agriculture et de l'industrie arrête :

Monsieur le Préfet de la Seine est prié de vouloir bien faire faire aux deux points de rencontre des chemins indiqués dans la présente délibération, un siphon qui permette de laisser aux chemins leur niveau actuel.

Le Conseil municipal charge Monsieur Cocheris, Conseiller général du canton de Longjumeau du suivi de cette affaire qui est des plus urgente et l'autorise à faire toutes les démarches nécessaires à l'accomplissement du désir exprimé dans la présente délibération.

Il faut préciser que cette délibération avait été prise par le Conseil municipal dans lequel siégeait à l'époque deux gros fermiers de Grigny dont M. Godefroy de la ferme Neuve. Ils prêchaient comme on dit, pour leur paroisse. Les travaux furent exécutés… mais pas les siphons.

Entrepris dès 1891, les travaux de ce qui est dit souvent dérivation de l'Avre, sont terminés deux ans plus tard. D'une longueur de 102 kilomètres, établie majoritairement en souterrain, la dérivation transporte par gravité quelques 100 000 m3 d'eau par jour.

Dès 1895, Bienvenüe entreprend une nouvelle dérivation : celle des eaux du Loing et du Lunain dont les sources, repérées par Belgrand, sont situées entre Melun et Sens. Menée sous la direction de Bienvenüe puis sous celle de Basinet, l'exécution de la dérivation des eaux du Loing et du Lunain a rencontré de grandes difficultés, notamment dans la traversée des argiles instables de Fontainebleau et dans les marnes de L'Hay-les-Roses. Formé par la réunion de la branche du Loing (14 kilomètres) et de celle du Lunain (7 kilomètres), l'aqueduc principal présente une longueur de 73 kilomètres. Essentiellement souterrain, il est construit parallèlement à celui de la Vanne et conçu pour pouvoir recevoir les eaux de ce dernier en cas d'accident. Il présente dix siphons dont le plus long, qui traverse la vallée de l'Orge à la hauteur de Viry et de Savigny, mesure 3025 mètres.

Le 11 juin 1900, les premières eaux des nouvelles sources sont enfin reçues dans le réservoir de Montsouris. Cette nouvelle ressource procure à la ville de Paris 50 000 m3 d'eau supplémentaire par jour. Cette eau arrive à point nommé en pleine Exposition universelle. Quelques jours plus tard la première ligne du métro de Paris, Porte Maillot-Vincennes sera mise en service par ce radieux matin du 19 juillet 1900.

Aujourd'hui et demain ?

Le problème de l'alimentation en eau de grandes villes comme Paris est un véritable casse-tête car sitôt qu'on a réussi à le résoudre, on assiste à un transfert de population rurale, attirée par cette amélioration des conditions de vie, et le problème se repose à nouveau. On a donc décidé de recourir directement à un prélèvement des eaux de la Seine mais en utilisant des méthodes de purification qui permettent de distribuer un produit parfaitement sain. Les eaux prélevées en amont de la capitale sont décantées, filtrées, désinfectées à l'ozone et analysées en permanence avant d'être envoyées dans le réseau de distribution.

Tant qu'il y aura de l'eau dans la Seine, les Franciliens (dont nous sommes) ne seront jamais assoiffés.

Pour le second projet, le Conseil municipal avait été appelé à se prononcer sous la présidence cette fois de Monsieur Godefroy qui était devenu Maire.

Le Conseil municipal délibère le 26 août 1897 :
Le Conseil appelé a fournir son avis et ses réserves sur le projet formé par la Ville de Paris d'acquérir des terrains nécessaires à l'établissement de l'aqueduc de déviation des eaux de source du Loing et du Lunain. Après délibération, a formulé les réserves suivantes :

1 - Nature des travaux.
La nouvelle conduite de sera pas établie autrement que celle des eaux de la Vanne, soit en maçonnerie, soit en tuyaux de fonte. Le niveau ne devra pas dépasser celui de la butte existante actuellement. L'aqueduc traversant un territoire essentiellement agricole ne devra pas être établi sur arcades sous peine de causer une grande gène à la libre circulation des ouvriers des champs ainsi que des troupeaux qui pourront toujours y paître.

2 - Refuser de planter des arbres.
Il ne devra pas être non plus planté d'arbres tout le long de la dite conduite, plantation absolument nuisible aux terrains avoisinants qu'elle prive de tout rapport, entretenant également une multitude d'oiseaux, nouvelle cause de destruction pour les récoltes qui se trouvent a proximité.

3 - Conservation des drainages.
Les drainages qui se trouvent sur le passage de l'aqueduc ainsi que les tuyaux passant sous le dit aqueduc et les chemins vicinaux devront être conservés et aménagés pour le libre écoulement des eaux.

4 - Chemins ruraux traversés.
Les chemins ruraux qui coupent la conduite devront être établis de façon à ce que la pente ne dépasse pas 4 centimètres par mètre et que de chaque côté de ces montés et descentes il soit posé des garde fous de façon a éviter les nombreux accidents qui se sont produits jusqu'à ce jour suite au peu de prévoyance de l'administration. Si la Ville (NDLR : celle de Paris) se croit autorisée à les traverser sans allouer aux communes aucune indemnité, elle devra les entretenir en son état d'empierrement les montées qu'elle pratique sur l'aqueduc et répondre aux demandes et réclamation de l'autorité locale.

… et les travaux furent exécutés sans qu'aucun arbre ne soit planté et d'éviter ainsi "l'énorme" consommation de grains de blé à laquelle se seraient livrées les joyeux pinsons et autres passereaux !!!

Compte rendu du conseil municipal de Grigny en date du 26 août 1897, relatif à la création de la dérivation des eaux du Loing et du Lunain >>>

D'où vient l'eau qui coule dans les aqueducs qui traversent Grigny?

La source principale qui alimente l'aqueduc de la Vanne est la "Fontaine Bouillarde" située à 114 mètres d'altitude sur le territoire de la commune de Saint-Benoît sur Vanne à 30 kilomètres à l'ouest de Troyes. Un décret de 1866 prescrivit l'établissement d'un aqueduc de dérivation des sources de la Vanne pour amener les eaux à Paris en passant par Sens, Fontainebleau et arriver dans un réservoir à Montrouge.

En 1899, plusieurs sources captées dans les vallées du Loing et du Lunain vinrent augmenter la fourniture en eau. Elles sont de nos jours supérieures en débit à celles de la Vanne. Elles représentent 210.000 m3/jour contre 145.000 pour la Vanne et 106.000 pour la Voulzie. Le débit maximal peut atteindre 461.000 m3/jour mais la moyenne admise est de 300.000 m3/jour.

A Nemours, le captage des eaux de la Joie, en aval de l'usine de traitement, fournit un supplément de 18.000 m3/jour d'une eau pure.

Pour les sources "hautes", celles de la Vanne et de la Voulzie, l'eau circule par simple gravité, sur une pente minime de 1/10 de millimètre par mètre, à une température constante de 12°, jusqu'à la station-usine de Desquinemare située en forêt de Fontainebleau près de Veneux-les-Sablons.

Les eaux du Loing et du Lunain qui sont les sources "basses" arrivent à Sorques près de Montigny-sur-Loing où elle sont pompées pour les élever jusqu'à la station de Desquinemare. C'est là qu'elles sont brassées et chlorées. Elles arrivent à Paris 38 heures plus tard pour y être déchlorées et stockées dans les grands réservoirs souterrains de Montrouge d'une capacité de 300.000 m3.

Pour économiser la constructions d'aqueducs pour la traversée d'une vingtaine de vallées on a installé des canalisations en siphon. Par contre, des ouvrages importants ont du être réalisé comme les ponts-aqueducs de Pont-sur-Yonne, du Grand Maître en forêt de Fontainebleau et d'Arcueil sur la vallée de la Bièvres.

Eugène BELGRAND (1810-1878)

Ingénieur hydrologue, Belgrand effectue à Avallon des travaux remarqués par Haussmann, alors préfet de l'Yonne. Ce dernier, nommé à Paris, se souviendra de Belgrand lorsqu'il faudra transformer l'équipement hydraulique de la capitale (1854).

Les Parisiens ne consomment alors que les eaux de la Seine et de l'Ourcq, déjà insuffisantes et polluées. Deux aqueducs, construits par Belgrand, détournent à leur source les eaux de la Dhuis et de la Vanne, amenées respectivement à Ménilmontant et à Montsouris. A partir de ces buttes, hautes de 103 et 80 mètres, l'eau est aisément distribuée jusque dans les immeubles de plusieurs étages.

Cette eau potable sera réservée, après refonte du système des canalisations, aux seuls usages domestiques. Dans le même temps, le réseau des égouts parisiens est modifié en fonction des agrandissements de la ville : collecteurs débouchant extra muros et quatre cents kilomètres supplémentaires de conduites souterraines.

 

 

Lien vers l’article :  http://www.grigny91.fr/histoire/orme7b.htm

 

Publié dans Canaux et rivières

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